L'OIE DES SERIES
Vous lûtes La naissance de l'oison à tête barrée du square des Batignolles. Vous dévorâtes la suite : L'oie à tête barrée devient gouvernante. Mais, point encore rassassiés, davantage vous en réclamâtes. Eh bien, heureux lecteurs, voici la suite de cette saga à succès : L'oie à tête barrée se fait jeter comme une malpropre.
D'abord un résumé pour ceux qui ont raté les épisodes précédents, qui sont au boulot et qui n'ont pas le temps de lire trois posts. Faut quand même pas déconner.
Il était une fois une oie à tête barrée née dans le square de Batignolles, qui avait été rejetée par les membres de sa famille, parce qu'ils la trouvaient un peu pénible avec sa manie de vouloir tout régenter (tu vois Claire ce qui risque de t'arriver…)
(… Pas la peine de me regarder comme ça, tu vois très bien ce que je veux dire…)
Or, vu le biotope du XVIIe arrondissement, notre oie, appelons-la Sidonie, avait peu de chances de fonder une nouvelle famille (rappelons que l'oie à tête barrée se rencontre essentiellement sur les contreforts de l'Himalaya). Elle jeta donc son dévolu sur une innocente famille de colverts et se fit embaucher d'office comme tatie plénipotentiaire à plein temps, profitant de son gabarit imposant et de son sale caractère atavique pour mener les canetons à la baguette, usurpant au passage les prérogatives de la mère biologique. Voilà, c'est fini le résumé.
Deux semaines passèrent. D'abord surprise, et comme paralysée par le culoie (c'est un mot médiéval qui veut dire “le culot de l'oie”. Ils étaient très joueurs au Moyen Age), la cane reprit de la plume de la bête et décida d'évincer l'oie. Cette vieille chouette qui prétendait veiller sur la couvée n'avait pu empêcher deux des canetons de disparaître, victimes innocentes de ces saloperies de corneilles. Et ça, la cane, ça lui était resté grave en travers de la gorge. Elle devait se fader ce chaperon acariâtre toute la sainte journée, et en plus c'était un body-guard ultraminable.
Mais comment se débarrasser de l'importune ?
Un jour, profitant d'un instant d'inattention de Sidonie, qui se lustrait les plumes, elle prit le maquis. Elle se planqua dans les fourrés, sa progéniture à sa suite. Des buissons suffisamment denses pour que l'oie ne puisse les suivre. Sidonie demeura de longues heures devant les fourrés, tentant vainement d'y pénétrer. Les observateurs attentifs pouvaient apercevoir la cane restée à couvert, les trois petits se dandinant derrière elle, à quelques centimètres seulement de l'oie impuissante. C'était très pathétique et très comique en même temps. Comme la vie, en somme. Au bout de deux jours, l'oie finit par renoncer. La mort dans l'âme, elle retrouva l'étang et sa solitude de vieille fille.
Pour la cane, le destin se fit plus cruel encore. Ses trois derniers canetons périrent à leur tour. Le mystère de leur disparition reste entier à ce jour : ont-ils été tués par un chat ou une corneille ? Sont-ils restés coincés dans l'entrelacs de branchages ? L'oie s'est-elle vengée sur eux à coups de bec meurtriers ? C'est triste et beau comme du Shakespeare, non ?
Ben oui, ça finit mal. On n'est pas chez Disney ici !
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