1 décembre 2007
CHANSON, TOI QUI NE VEUX RIEN DIRE*
Je ne vous l’ai jamais dit, mais j’ai un t.o.c.… et même deux pour être tout à fait honnête. Pour ce qui est de ma seconde manie, c’est pas bien grave… Je fais des losanges avec mes pieds lorsque je suis stressée. Faut juste que j’évite d’être flippée quand je suis en rollers, sinon je me ramasse, mais à part ça, ce n’est pas trop gênant. C’est un t.o.c. en toc. Et même, grâce à ça, j'ai la cheville souple et gracieuse (en twist, je déchire ma race).
Le premier, en revanche, est une vraie calamité : je suis un “human juke-box”. Un mot anodin dans une conversation, une situation banale, une image fugace font office de pièce de monnaie. Chtoung, le mécanisme s’enclenche et je me mets à fredonner, souvent sans savoir pourquoi, une chansonnette à deux balles. Et mon répertoire est vaste : il couvre tout le registre Maritie et Gilbert Carpentier de mon enfance, plus les antiquités qu’aimaient ma mère (Luis Mariano, notamment), et un gros pan de pop-rock, des années 80 à nos jours. Résultat, au cours de la journée, je me surprends à fredonner du France Gall devant mon ordi, en finissant de taper un truc debout : (« Elle faisait du S.R. debout, c’est peut-être un détail pour vous, mais pour elle ça veut dire beaucoup … »), à susurrer du Gainsbourg quand je quitte le boulot une heure avant certains de mes collègues – que ça énerve ; en revanche, ça ne les énerve pas d'être payés plus que moi (« Je suis venue vous dire que je m’en vais, et vos sanglots longs n’y pourront rien changer ») ou à brailler du Téléphone, parce que Claire me montre la pleine lune quand on sort de chez la nounou (« Et la lune est si blonde ! »). Il existe des chansons pour à peu près toutes les circonstances de la vie et, manque de bol, j’en connais un paquet.
Demy portion
Mais le plus souvent, c’est un bout de phrase prononcé par des collègues**, que je termine en vers (et contre tous). « J’ai vu la chef, m’annonce ma voisine de bureau, elle m’a dit... » «... d’aller là-haut sur la colline, de l’attendre avec un petit bouquet d’églantines. T’as attendu, attendu, elle n’est jamais venue. Zaï, zaï, zaï, zaï ! » « Maryse, je peux pas l’encadrer ! » me confie-t-on. « Oh Maryse, si tu savais, tout le mal que l’on te fait », réponds-je. Au début, ça amusait plutôt la galerie. Mais, à force, ils n’en peuvent plus d’avoir Jacques Demy à demeure. Pour moi aussi, c’est fatigant. Par exemple, une personne de mon entreprise s’appelle Sonnenschein (rayon de soleil), et dès qu’elle passe, je chante en mon for intérieur, sans même y réfléchir : « Ain’t no sunshine when she’s gone ». Le même refrain tous les jours, ça use, même quand c’est une bonne chanson (et c’est plus souvent une grosse merdouille). Surtout quand on chante comme une coucourde. Ce qui me sauve du lynchage, c’est que j’ai plus l’organe de Françoise Hardy que celui de Chimène Badi.
Ce t.o.c. en a remplacé un autre, tout aussi débilitant : la calembourite aiguë. Pendant plusieurs années, la moindre phrase devenait prétexte à un jeu de mots foireux (il y a quelques restes, hélas ;)) Ça surgissait tout seul, comme un abcès de la pensée. Cela se produisait le plus souvent au travail, aussi. En fait, j’ai juste changé de t.o.c. en changeant de boulot. Pour le prochain, j’aimerais bien tester la confiancinite en soi, avec progression de carrière. Mais je sens que je manque de tactique pour ce t.o.c.-là.
Mais rassurez-moi, je ne suis pas la seule à avoir de petits t.o.c. en stock ?
* Je te le fais pas dire, Marguerite.
** Collègues que je côtoie plus que mes enfants... Quelles vies d'abrutis on mène ! Et l'autre Jean de la Lune qui voudrait qu'on travaille plus pour nos entreprises bien-aimées. Compte là-dessus...
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