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Karmara : voyage en mère
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27 décembre 2007

9 CUBE

Dans un billet précédent, je me moque (un peu) du marché de Noël d'Enghien, la rutilante voisine d'Epinay-sur-Seine*. En commentaire, Maky me demande si Enghien gagne à être connue. Et au vu de ce que je raconte, déduit : “Non, apparemment.” En fait, si. C'est cool d'habiter à côté d'une ville comme ça, surtout quand on vit dans une ville comme la mienne… Pourtant, quand j'entends dire du mal de la Seine-Saint-Denis, mon poil se hérisse. Surtout quand les remarques viennent de personnes qui n'y foutent jamais les pieds. Tiens, jeudi dernier, le RER C est tombé en rade à Saint-Ouen. Une passagère, la vingtaine, s’est indignée (elle se rendait à Saint-Gratien, dans le Val-d’Oise) : “Saint-Ouen ! Mais qu’est-ce qu’on va faire ? C’est mal-famé ici ! En plus, c’est la nuit !” Il était 18 h 15... Certes, il y a plein de gens ici qui vivent dans des conditions difficiles. Plus qu'ailleurs. Il y a une minorité de petits cons, prêts à faire payer aux autres la difficulté de leur existence, et une grosse majorité de gens d'une grande dignité, qui font ce qu'ils peuvent pour garder le nez hors de l'eau. Il est où l'ascenseur social ? La nounou de Claire habite dans une tour d'un des quartiers les plus durs de la ville (nous vivons dans ce quartier, mais dans une petite enclave pavillonnaire, très tranquille). Ce matin, un gamin de l’immeuble m'a dit qu'il y avait une mammy avec des béquilles qui habitait au 16e étage. “Et comment elle fait quand l'ascenseur est en panne ?” “Elle y va doucement”, m'a-t-il répondu. Doucement ! Ça me rendrait folle, moi, un truc pareil ! Dans cet immeuble, tout le monde est poli. On retient l'ascenseur pour la maman avec sa poussette, on dit “Bonjour”, “Bonsoir”, on tient la porte d’entrée. Ce n'est pas forcément vrai dans d'autres immeubles plus huppés ou dans le métro parisien. J'ai entendu une fois une des filles de la nourrice parler rudement à des gamins qui ne l'avaient pas saluée. Ils ne la ramenaient pas, les minots ! Une de mes amies habite Levallois. Dans la classe de CP de son fils, il y a des enfants d'origine américaine et norvégienne. Dans celle d'Anouk, ils ont des parents algériens, sri-lankais, ivoiriens… Les deux meilleurs de la classe s'appellent Ibrahim et Lina. Certes, j'ai les boules en pensant que cette petite Lina si sage et si douée sera peut-être contrainte de mettre un voile, comme en portent sa mère et beaucoup d'autres femmes ici. Je peux juste espérer qu'elle aura quand même le choix… En passant, Lina, ses deux petits frères et leurs parents vivent dans deux-pièces. Et cela n'a rien d'exceptionnel. Epinay, c'est cette pauvreté... et cette richesse. C'est aussi l'endroit où nous avons pu nous installer, avec nos moyens limités. Notre petite maison dans la banlieue est charmante. Les bords de Seine sont magnifiques. Comme je l'ai déjà dit (je suis un peu radoteuse, comme fille), ils ont inspiré Monet, un peu en amont, à Argenteuil, et il suffit de se balader au printemps pour comprendre pourquoi. Même en hiver, c’est pas mal... Le revers... Mais Epinay, c'est aussi ultrachiant. La centre-ville est moche, sans cohérence urbanistique. Il n'y a quasiment pas de tissu commercial. Et ne faisons pas d’angélisme : ce n’est pas la grande fiesta intercommunautaire, même si les rapports restent courtois. On ne se mélange guère et les affinités sont – hélas – largement déterminées par la religion. C’est en tout cas mon sentiment. Je deviendrais neuneu si j’étais consignée là. Alors, je me réjouis de travailler à Paris, et de profiter des richesses de la capitale, dès que j'en ai l'occasion. Et je suis également heureuse d'être tout à côté de ce gros chou à la crème qu'est Enghien-les-Bains. La veille de Noël, je suis allée m’y balader avec les filles. On a bu du chocolat, mangé des gâteaux dans un salon de thé. Les commerçants de la ville organisaient une tombola gratuite. On pouvait rejouer à chaque fois qu’on gagnait. Et grâce à la main magique d’Anouk on a remporté quatre barrettes en plastoc, deux parts de tartiflette, un bon pour une séance d’UV et une journée détente (aquagym, hammam, sauna) dans un institut de beauté. Et je dirais du mal d’Enghien-les-Bains la prospère ! Déconne, c’est trop de la balle ! *Nous jouxtons aussi Saint-Denis, l’Ile-Saint-Denis, Villetaneuse (93), Gennevilliers (92), Argenteuil, Deuil-la-Barre et Saint-Gratien (95).
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Commentaires
T
Ce sont des lieux attacchants...j'ai enseigné 10 ans aux tarterets à Corbeil et je garde un attachement particulier pour cet endroit... j'y ai vécu des choses difficiles mais aussi des échanges magiques avec les habitants de ce quartier...
K
@Lanfeust : Cimer !
K
@Croissant : Oui, mais Brad lui il a carrément racheté l'usine d'hélicos.<br /> @Mab : c'est ça, c'est chaud et froid, gris et coloré... Comme la vie, quoi.<br /> @Sœur Anne : je connais les clichés sur le Nord, pour y avoir vécu deux années ;-)) C'est vrai que les paysages urbains, dans le coin, ne sont pas très touristiques. Mais une certaine "poésie" peut aussi se dégager de cet environnement. Tiens, par exemple, j'ai vu il y a qq temps un héron sur le canal Saint-Denis, dans une zone pas franchement bucolique.
S
Je suis ravie de t'avoir lue, parce que effectivement, vu de province à la TV, les choses ne paraissent pas du tout pareilles...<br /> Ceci dit, à chaque fois que je fais les derniers km m'amenant de mon riant Nord Pas de Calais (Oui, les clichés, on connit aussi) vers la gare du Nord, je trouve ça extrêmement déprimant...
M
Pas mal envoyé, le chaud et le froid se marient parfaitement dans ces lignes.
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